Aux grands maux… Les animaux ?
par Camille Studer
6 juillet 2021

C’est dans les années 1960, au sein du cabinet du pédopsychiatre américain Boris Levinson que la thérapie assistée par l’animal fait ses débuts. Le psychiatre fait alors le constat suivant : ses jeunes patients se sentent plus en confiance et à même de communiquer lorsque les séances se déroulent avec Jingles, le chien du Dr. Levinson. S’en suit une série d’études et de tests pour le médecin qui comprend l’intérêt et les bienfaits d’avoir recours aux animaux dans le travail de thérapie, bien qu’à l’époque, la communauté scientifique ne partage pas tout à fait son avis. Boris Levinson matérialise ses années de recherche dans le livre Pet-Oriented Child Psychotherapy et devient le pionnier de cette approche thérapeutique.

Aujourd’hui, la thérapie assistée par l’animal est plus largement adoptée par la communauté scientifique, et poursuit son chemin au-delà des frontières américaines. Cette approche est désormais utilisée comme traitement complémentaire de certaines pathologies comme la maladie d’Alzheimer. Elle se retrouve aussi dans l’accompagnement thérapeutique des personnes en situation de handicap physique ou mental, ou des personnes âgées qui présentent des pertes cognitives ou des problèmes de motricité. Peu à peu, les animaux s’invitent aussi en milieu carcéral, au sein de familles en conflit ou même dans les tribunaux. Tour d’horizon.

 

La relation homme-animal, un remède pour le corps et l’esprit

Les bénéfices de la thérapie assistée par l’animal peuvent d’être d’ordre psychologique ou d’ordre physique, comme le rappelle le consortium américain de santé UCLA Health. Côté psychologie, le simple fait de caresser un animal peut avoir des vertus apaisantes et stimule la production de sérotonine. Ce contact avec l’animal permet aussi au patient de réduire le sentiment d’anxiété, de se détendre et de se sentir en confiance, de réduire un sentiment de solitude ou encore d’améliorer nettement sa stimulation mentale. Pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer par exemple, le travail avec l’animal permet d’encourager le travail de mémoire.

L’efficacité de la thérapie assistée par l’animal (TAA) est particulièrement reconnue pour certains troubles, comme le trouble du spectre de l’autisme (TSA). Exemple avec l’équithérapie pour les personnes autistes, grâce à laquelle les patients voient leurs fonctions motrices améliorées, leurs capacités à sociabiliser renforcées et une estime de soi (re)trouvée. D’un point de vue physiologique, la thérapie assistée par l’animal permet de réduire le traitement médicamenteux de certains patients, de diminuer des douleurs physiques ou encore de réduire la pression artérielle pour certaines pathologies. Dans le cas de l’équithérapie, le cheval ou poney agit comme un médiateur. Comme l’explique Laurence Hameury, médecin pédopsychiatre, « le cheval est moins complexe à décoder qu’un humain. Il accepte facilement l’enfant, le porte, le balance, le berce, lui transmet des sensations. Il a aussi ses propres besoins et peut exprimer sa volonté et son désaccord. Il a des capacités d’empathie et se montre assez tolérant avec les particularités de comportement des enfants autistes. Il déclenche de son côté des réactions d’empathie chez l’enfant et ainsi favorise le lien affectif et la prise de conscience d’autrui. »

Faire participer l’animal à la guérison ou le mieux-être d’un patient est une pratique non seulement reconnue, mais éprouvée et qui crée des émules. Désormais les animaux sont aussi intégrés à des parcours de soins qui accompagnent des victimes de stress post-traumatique. A l’instar de Lol, premier chien français d’assistance judiciaire qui se tient à la barre aux côtés des victimes, pour leur permettre de libérer leur parole et de se sentir en confiance. Rassurer, accompagner, apaiser : les vertus de l’animal sur l’humain sont légion !

Pour aller encore plus loin dans la thérapie à médiation animale, de plus en plus de praticiens choisissent de faire se rencontrer des personnes souffrant de troubles psychiques et psychologiques et des animaux ayant eux aussi souffert de différents traumatismes. Les patients peuvent alors souvent « choisir » leur animal en fonction du lien qu’ils ressentent et qui se crée sur le moment. A travers plusieurs portraits, la série « The me you can’t see », aborde la question de la santé mentale et des différentes méthodes actuelles qui existent pour traiter différents troubles mentaux.

Pour les personnes ayant vécu de lourds traumatismes comme la perte d’un enfant, on y retrouve le Dr. Joanne Cacciatore, fondatrice de la MISS Foundation et de la Selah Carefarm. Plus de 40 animaux maltraités ou abandonnés ont été sauvés et vivent dans cette « ferme » en Arizona. Aux côtés des animaux, ce sont différents thérapeutes, psychologues, professeurs de yoga et autres spécialistes d’approches paramédicales qui travaillent ensemble pour aider les patients à reprendre goût à la vie en pleine nature et auprès d’animaux en tout genre (chiens, chats, chevaux, brebis…). Depuis 25 ans, des milliers de famille en deuil ont pu expérimenter les bienfaits de cette approche thérapeutique.

 

La thérapie assistée par l’animal version 2.0

Une pandémie mondiale ? Qu’à cela ne tienne. Que ce soit les associations ou les acteurs de santé, tout le monde s’est mis en ordre de bataille pour permettre aux patients de poursuivre leur thérapie assistée par l’animal, mais à distance. A l’hôpital d’Ottawa, au Canada, on propose depuis septembre le programme Virtual Pet Therapy qui consiste, par écrans interposés, à permettre aux patients hospitalisés de toujours recevoir la visite d’un animal, mais cette fois-ci sur tablette. Si le virtuel ne remplace pas le réel, les premiers résultats de cette thérapie 2.0 sont encourageants et l’hôpital d’Ottawa songe même à développer ce programme au-delà de la crise sanitaire, notamment pour les patients dont la condition physique ne leur permet pas d’être au contact d’un animal.

Que ce soit pour son hôpital ou son université, Stanford a également eu à cœur de maintenir le lien entre les animaux d’un côté, et les patients, les étudiants et le personnel de l’autre, coutumiers de la thérapie assistée par l’animal. Par visioconférence Zoom ou sur Instagram, tous les moyens sont bons pour continuer de profiter des bienfaits d’une compagnie animale ! Autre exemple aux États-Unis, où la structure Pet Partners a trouvé refuge sur le réseau social Facebook, depuis lequel elle continue de rendre possible la rencontre entre animaux et ceux qui en ont besoin, à l’épreuve de la solitude.

La pandémie n’aura pas eu raison de la thérapie assistée par l’animal, et aura même placé la relation homme-animal sur le devant de la scène, l’isolement des confinements et la violence de la crise ayant donné lieu à une vague d’engouement pour l’adoption d’animaux de compagnie.

Virtuelles ou réelles, les connexions entre les animaux et les hommes ne s’arrêteront pas de sitôt et nous rappellent encore une fois l’importance de nos liens à la nature et à tous les êtres qui la composent.

 


A travers ces Stories, Azickia vise à mettre en avant des initiatives à impact social, en France et dans le monde, et cela sans adhérer pour autant à toutes les opinions et actions mises en place par celles-ci. Il est et restera dans l’ADN d’Azickia de lutter contre toute forme de discrimination et de promouvoir l’égalité pour tous.

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Photo : @jusdevoyage – Unsplash